Voilà une enquête qui s'annonce mal surtout quand on s'appelle l'inspecteur Specteur et qu'on est suppôt du diable. Et d'abord, comment il est mort, ce prêtre ? Et c'est, quoi ces têtes qui disparaissent ? Et à quelles expériences s'est-on livré sur ce pauvre homme trouvé mort dans une poubelle ? Et qui c'est ce disciple quie Satan lui-même craint plus que le Bien ? Et comment délivrer mademoiselle Zelle, figée dans le temps ? Et comment s'accommoder de la psychose maniacodépressive du commandant Mandant ? Et c'est quoi cette menace de fin du monde ? Avec toutes ces questions, l'inspecteur Specteur a de quoi faire blanchir sa matière grise.

Quelque part entre les histoires délirantes de l’Espagnol Eduardo Mendoza et l’humour libidineux du personnage d’Austin Powers créé par Mike Myers, il y a Ghislain Taschereau et son héros Specteur.

L’Inspecteur Specteur et Le Curé Ré est la suite de L’Inspecteur Specteur et La Planète Nète. L’humoriste y met encore une fois à l’épreuve son innommable inspecteur, disciple de Satan, propriétaire d’une arme de calibre .666 et d’un perroquet lubrique. Malgré les macchabées qui s’accumulent, les trous noirs s’ouvrant sur le néant, un mystérieux peintre réincarné en gargouille, une certaine mademoiselle Zelle figée dans le temps et Satan qui apparaît sous plusieurs formes, Specteur mène son enquête tout en jouant les séducteurs : “[V]ous avez du tact comme il ne s’en fait plus, vous avez une grâce à faire flétrir un top model, vous avez de la classe, vous avez une autre clope, s’il vous plaît ?” Ainsi sévit Specteur, accompagné de son pote le curé Ré, religieux démissionnaire qui disparaît derrière son sexe en proie à une érection aussi incontrôlable que “le nez de Pinocchio au beau milieu d’un mensonge”.

Y a-t-il un écrivain derrière l’humoriste Ghislain Taschereau ? Son écriture transcende-t-elle son personnage de comique ? Les nombreux dialogues, l’univers visuel flirtant avec le cartoon, le style plus cinématographique que littéraire, l’humour de situation et les calembours sont indéniablement plus visuels que romanesques. On ne peut toutefois reprocher à l’auteur de ne pas aller jusqu’au bout de son cabotinage, comme en témoigne la fin particulièrement colorée de ce polar satirique. --Marie Hélène Poitras